« Un peu avant seize heures le 17 août, un bruit plus ou moins diffus, totalement inconnu, se distingue à l’Ouest pour bientôt s’amplifier et se transformer en un roulement discontinu des chenilles d’une colonne blindée qui dévale les monts d’Eraines pour franchir la Dives sur le pont du Grand-Coulibœuf.

Le tout forme un ruban ininterrompu jusqu’au sommet de la colline, accompagné d’un nuage de poussière très blanche. Il s’agit intégralement de chars Sherman. Pour franchir le pont relativement étroit à l’époque, ils ne ralentissent qu’à peine, se remettant rapidement en ligne avant de s’engager, guidés par l’interphone du chef de char debout dans sa tourelle, et ce spectacle va durer plus de deux heures sans aucune interruption.

Il s’agit de la plus grande partie de la 4e Brigade Blindée Canadienne, comprenant les 21e, 22 et 28e Régiment Blindé qui franchissent la Dives sur les ponts intacts du Grand-Coulibœuf et de Morteaux, avec pour objectif, Louvières-en-Auge, suivis de la 10e Brigade d’Infanterie.

Ces deux ponts sont chacun doublés d’un ancien gué naturel, et ces derniers, de même que celui de Jort, sont tellement anciens qu’ils correspondent à un réseau de voies romaines, à défaut d’être antérieurs à cette période. Sans aucune équivoque, le gros de la 4e D.B. Canadienne, emboîte le pas de la 1e D.B. Polonaise vers Trun, avec un décalage minimum de 7 heures sur cette dernière, qui a assumé dans cette opération le poids et la charge d’un véritable fer de lance, lui permettant ainsi de continuer son action téméraire sur Chambois. »

Extrait de : F.A. JAMES, Nos plus longs mois (j+76), p251, chapitre XVI : La bataille de Morteaux-Couliboeuf 1re D.B. Polonaise contre 85 D.I. éléments 12 S.S. H.J.
4e D.B. Canadienne contre 12 S.S. H.J., éditions Corlet, 1994

« Devant ces échecs répétés, le Général Simonds, commandant le IIe Corps d’Armée Canadien donna l’ordre au Général Jefferson, de la 10e Brigade d’Infanterie canadienne de se diriger à l’est et de passer la Dives à Couliboeuf, et à Morteaux-Couliboeuf, où des éléments du Génie des 6e, 8e et 9e Escadrons étaient en train de monter un pont.

Dans l’après-midi le Général Kitching fit passer ces ponts au 22e Régiment Blindé (The Canadian Grenadier Guards) et au 26e Régiment Blindé (The Bristish Columbia Regiment) de la 4e Division Blindée Canadienne, qu’il commandait. Les chars canadiens progressèrent ensuite vers Louvières-en-Auge, sans rencontrer grande résistance. »

Extrait de : Docteur Paul GERMAN, La Bataille de Falaise, Corlet Imprimeur

Lieutenant-général Guy G. Simonds

Le lieutenant-général Guy Simonds passe en revue les troupes du 2e Corps canadien à Meppen, en Allemagne, le 31 mai 1945.
Photo par C.H. Richer. Ministère de la Défense nationale / Archives nationales du Canada, PA-159372.

Guy Granville Simonds, né à Bury St. Edmunds (Angleterre) le 23 avril 1903, décédé à Toronto (Ontario) le 15 mai 1974. Officier de l’Armée canadienne.

Fils d’un militaire britannique établi au Canada, Guy Simonds est trop jeune pour combattre lors de la Grande Guerre. À la fin des hostilités, de 1921 à 1925, il étudie au Royal Military College de Kingston (Ontario) où il obtient son diplôme avec mention et se mérite de nombreuses distinctions pour ses succès académiques, sa conduite et sa discipline. En 1925, Simonds entre dans la Force permanente canadienne et sert dans la Royal Canadian Horse Artillery à Petawawa et à Winnipeg. De 1936 à 1938, le jeune capitaine suit les cours du Staff College de Camberley, en Angleterre. On y remarque son intelligence et son excellente compréhension des théories militaires et des problèmes spécifiques à la guerre moderne. À la fin du cours, Simonds reçoit une recommandation très louangeuse du commandant du collège.

À son retour au Canada, au printemps 1938, Simonds se joint au personnel du Royal Military College. Les articles sur la guerre mécanisée qu’il propose au Canadian Defence Quarterlyconfirment sa place parmi les penseurs les plus brillants de l’Armée canadienne. Après la proclamation de l’état de guerre du 10 septembre 1939, Simonds, alors major, est affecté au poste d’officier d’état-major général, classe 2 de la 1re Division d’infanterie. Il est stationné en Angleterre avec sa division en décembre 1939.

En juillet 1940, Simonds est nommé commandant du 1er Régiment de campagne de l’Artillerie royale du Canada, un régiment démoralisé qui a vécu la déroute de Dunkerque. Ce poste sera de courte durée; en novembre 1940, Simonds se voit chargé par le général Andrew McNaughton de la mise sur pied d’un programme condensé d’entraînement d’officiers, le Canadian Junior War Staff Course.

Reconnu comme un homme d’une grande habileté et comme un planificateur hors pair, Simonds connaît une ascension fulgurante : il est nommé officier d’état-major général, classe 1 de la 2e Division d’infanterie en mai 1941, commandant de la 1re Brigade d’infanterie en septembre 1942 et, en avril 1943, commandant de la 1re Division canadienne d’infanterie. Il est alors major-général.

Simonds connaît sa première expérience de combat à la tête de la 1re Division d’infanterie, à l’occasion de l’invasion de la Sicile. Il organise habilement blindés, artillerie et infanterie et dirige ses troupes avec assurance lors des batailles de Nissoria, d’Agira et de Regalbuto, ce qui lui vaut d’être remarqué par le commandant de la 8e Armée, le général Bernard Montgomery.

Du 1er novembre 1943 au 29 janvier 1944, Simonds commande la 5e Division blindée canadienne. Puis, en janvier 1944, il est promu lieutenant-général et nommé officier général commandant du 2e Corps canadien, qu’il doit entraîner en vue de l’invasion prochaine de la Normandie.

Le 2e Corps canadien établit son quartier général en France en juillet 1944, au moment où la campagne de Normandie semble s’enliser. En juillet et en août, Simonds dirige quatre importantes opérations contre les Allemands : Atlantic, Spring, Totalize et Tractable. Ce sont des opérations difficiles contre un ennemi qui défend âprement chaque parcelle d’un terrain qu’il connaît bien. Malgré le succès mitigé de l’opération, le plan de Simonds pour Totalize (7 août) est remarquable à cause des tactiques ingénieuses mises en œuvre pour neutraliser les blindés et les défenses antichars des Allemands. C’est à cette occasion que Simonds invente le « Kangaroo  », un véhicule de transport de troupes improvisé en débarrassant des canons automoteurs Priest de leur pièce d’artillerie. Grâce à l’opération Tractable (14 août), les Canadiens et les Polonais réussissent à fermer la brèche de Falaise.

Le 27 septembre 1944, Simonds assure temporairement le commandement de la Première Armée canadienne, en remplacement du général H.D.G. Crerar. Il fait preuve à nouveau d’une grande adresse tactique pendant la libération de l’estuaire de l’Escaut et la vigueur de son commandement plaît à Montgomery. Toutefois, Crerar reprend son poste, et Simonds achève la libération de l’Europe du Nord-Ouest à la tête de 2e Corps canadien.

Après la guerre, Simonds demeure en Angleterre à l’Imperial Defence College. Il revient au Canada en 1949 comme commandant du Royal Military College de Kingston. De 1951 à 1955, il est chef de l’état-major général et il réorganise l’Armée canadienne en vue de la guerre de Corée, puis de la participation canadienne à l’OTAN.

Guy Simonds s’est grandement distingué parmi les généraux canadiens qui ont participé à la Deuxième Guerre mondiale. Aux dires de Montgomery, il était parmi les Canadiens le seul «  général capable d’assumer un haut commandement en situation de combat ». Le général Omar Bradley voyait en lui le « meilleur des généraux canadiens » et le général Sir Miles Dempsey le « meilleur de ses commandants de corps ». Tel qu’exprimé par l’historien Jack Granatstein dans The Generals, Guy Simonds a été, aux yeux de ses contemporains et des historiens, le meilleur soldat que le Canada ait produit au cours de la Seconde Guerre mondiale.

https://www.junobeach.org/fr/canada-in-wwii/articles/lieutenant-general-guy-g-simonds-2/