La vie à Morteaux-Coulibœuf durant l’occupation

Le 20 octobre 1940, le Conseil prend connaissance de la circulaire préfectorale en date du 7 octobre qui invite la commune à faire abattre cent stères de bois. Le Conseil, à l’unanimité, certifie que la commune est dans l’impossibilité de faire ce bois.
Les habitants et même les cultivateurs sont obligés d’en acheter hors commune. De plus, la main d’œuvre manque. La commune a 36 prisonniers et l’équipe agricole qu’on lui avait confiée a été rappelée au camp.

Le 2 décembre 1941, le Conseil prend connaissance de l’ordre de réquisition de 15 tonnes (40 stères de bois de chauffage ) destinées à la Commune.
Les Membres du Conseil, à l’unanimité, font connaître à Mr le Président de la Commission de réception de Falaise que la Commune est dans l’impossibilité de fournir les 40 stères qui lui sont imposés. Ce n’est pas de trouver ce bois qui est impossible ; mais de le faire. La commune n’a aucune réserve et manque totalement de main d’œuvre et a plus de 30 prisonniers. De plus, il ne reste plus d’ouvriers agricoles et les cultivateurs sont occupés à d’autres travaux urgents. Ils ne peuvent se mettre eux-mêmes à abattre ce bois ; ils n’en ont même pas en réserve pour eux et sont obligés d’en acheter hors commune.

Le 18 février 1942, le Conseil Municipal se permet d’attirer l’attention de Mr le Préfet sur le fait suivant :
Dans les petits Chefs-Lieux de Canton comme le nôtre, tout le travail retombe sur un seul secrétaire de Mairie ; or en ce moment avec les bons d’habillement et les bons de chaussures, ce travail ne peut être comparé à celui des Mairies qui ne sont pas Chefs-Lieux de Canton. Pourtant la rétribution est la même 3 fr par habitant pour l’établissement des cartes alimentaires. Il se trouve que des Communes plus populeuses peuvent allouer à leur secrétaire, qui a moins de travail, une indemnité supérieure à celle que nous pouvons attribuer au nôtre.
Ne pourrait-il pas être prévu une indemnité particulière pour les secrétaires de Mairie des quelques petits Chefs-Lieux de Canton du Calvados qui ne peuvent avoir plusieurs employés ?
C’est un vœu qu’émet le Conseil en espérant que Mr le Préfet voudra l’examiner avec bienveillance.
En conséquence, le Conseil décide d’attribuer au Secrétaire de Mairie qui assure seul le service de Secrétariat une « indemnité pour service cantonal des cartes textiles et autres ; celle-ci sera de 0,25 fr par habitant des Communes du Canton autres que la Commune du Chef-lieu soit 1260 fr à dater du 1 février 1941.

Le 2 octobre 1942, durant l’hiver qui approche, le Conseil se permet de demander à Mr le Préfet si les divers gardes vont être maintenues. Et si oui, afin d’éviter que les hommes ne tombent comme des mouches ; s’il ne serait pas possible de commencer à prévoir la construction de cabanes pour les gardes voies et les gardes parachutistes.
La S N C F va-t-elle autoriser l’installation de ces abris et à qui incomberaient les frais ?. Le Conseil espère que Mr le Préfet voudra bien répondre à ces diverses questions et l’en remercie vivement à l’avance.

Le 27 janvier 1943, Le Conseil demande à Mr le Préfet au nom de la population et pour le bien de la production agricole si les heures de gardes sur les voies ne pourraient être diminuées avec le changement d’heure. L’après-midi qui précède la garde est entièrement perdu pour les cultivateurs, ce qui cause un grand préjudice avec le peu de main d’œuvre dont la Commune dispose.
Le Conseil demande que les réquisitions de main d’œuvre pour les autorités d’occupation soient faites sur un plan cantonal afin que les communes soient imposées plus justement et suivant l’importance de leur population. Cette répartition pourrait être dirigée par Mr le Conseiller Général qui devrait connaître exactement le nombre de requis de chaque commune.

le 6 octobre et le 17 novembre 1943, les héritiers de la famille Thurin (ancien Maire) font un don de 100 fr et de 1 500 fr à la Caisse des Prisonniers de la commune. Une lettre de remerciement est envoyée aux généreux donateurs.
Dès le mois de Mai 1944, les hommes valides vont être requis, sous le contrôle de la Mairie, pour commencer la plantation des fameuses asperges dans le parc du château de Blocqueville. Ce travail s’effectue sous le contrôle d’un sous-officier allemand.
Le tiers de l’effectif de la corvée communale est rassemblé devant la Mairie avec les outils. Après l’appel effectué par le secrétaire de Mairie, le groupe d’une cinquantaine de requis se rend à pied dans un champ situé entre le hameau de Blocqueville et le bois de Cantepie. Chaque homme doit creuser un trou profond de 1 m,50 par jour. Le travail terminé, le rendez-vous est fixé au café de Morteaux pour être payé, prendre un casse-croûte et un rafraîchissement.
Sous le conseil de la Mairie, chaque foyer de la Commune a été encouragé à creuser sa propre tranchée à proximité de sa maison afin d’éviter d’être enseveli sous les décombres.
Cette recommandation a été faite en fonction du nombre de bombardements dans le département. En même temps, furent constituées des Équipes de Défense Passive disponibles à tout moment.
Sur l’initiative de la Mairie, plusieurs fermiers acheminent bénévolement des charrettes entières de denrées provenant de leur exploitation pour les nombreux réfugiés civils qui sont hébergés à Barou en Auge.
La secrétaire de Mairie recevra des mains d’un employé de la Préfecture du Calvados une somme importante en espèces qui sera répartie à chaque famille de passage.
Ainsi, la secrétaire est amenée à assurer une fonction d’agent du Trésor public. Plusieurs années après, il lui sera demandé des justifications sur la ventilation de cette somme !!

Le 1 mai 1944, Le conseil décide la construction de tranchées aux deux écoles. A l’école de Morteaux, les tranchées seront établies à l’extrémité de la cour en bordure du champ à Mr Bisson.
A l’école de Couliboeuf, elles seront faites dans le champ qui longe le jardin ( ce champ appartient à Mr Guilmin qui donne l’autorisation d’exécuter les travaux). Une ouverture sera faite dans le mur du jardin ce qui permettra l’accès facile des tranchées aux jeunes élèves. Ces travaux sont confiés à Mr Morin entrepreneur de travaux.
Le Conseil engage la population, par voie d’affiches, à établir des tranchées familiales pour se préserver des bombardements et des tirs que le département aura peut-être à subir.

Le mardi 15 août, jour de l’Assomption, un ordre imposé par les allemands est retransmis oralement par la Mairie. Il stipule que tous les civils doivent franchir la Dives avant 15 heures. Depuis 48 heures, la Mairie avait tenu tête aux officiers S.S qui exigeaient l’évacuation de la commune.

Le 24 septembre 1945, de nombreux conseillers signalent le danger qui existe du fait du dépôt de mines, une quinzaine environ, non encore désamorcées, qui se trouvent près du pont de Morteaux. Une imprudence peut provoquer la destruction du quartier voisin.
Une nouvelle lettre sera envoyée à l’Armée à seule fin de procéder au plus vite au désamorçage de ces engins, ainsi qu’à l’enlèvement des bombes et obus encore en dépôt sur le territoire de la Commune.

Le 11 octobre 1950, à l’occasion de la remise de la Croix de guerre à la commune, le Conseil demande à Mr le Maire de correspondre avec le Mr. Le Secrétaire de la Préfecture et le Colonel commandant la subdivision de Caen pour fixer l’horaire de la cérémonie.
Un banquet aura lieu au café de Morteaux, à seule fin que le maximum d’anciens combattants puissent accepter d’assister au banquet. Le prix du repas est fixé à 300 fr ; le surplus sera versé par le Comité des fêtes.


Création d’un syndicat de sinistrés

Le 14 février 1945, le Conseil Municipal après avoir délibéré, considérant :

Que la commune a été sinistrée par la guerre.
Que des dommages ont été causés aux domaines publics et privés.
Que des travaux sont nécessaires pour assurer la réparation de ces dommages.
Que la situation ainsi créée n’est pas particulière à la commune.
Que la presque totalité des autres communes du Département est dans une situation identique.
Que dans toutes ces communes, des dommages ont été causés aux immeubles, aux chemins vicinaux, aux réseaux de distribution électrique.
Que les réparations de l’ensemble de ces dommages posent à l’attention de divers Conseils Municipaux des problèmes identiques.
Que l’action des Conseils municipaux doit être coordonnée pour assurer la défense des intérêts collectifs et entreprendre les travaux d’intérêt intercommunal qui intéressent l’ensemble des communes sinistrées.
Qu’il y a lieu de constituer un organisme intercommunal ayant la capacité juridique pour prendre et assurer l’exécution des décisions d’ordre général sur toutes les questions connues à l’ensemble des Communes sinistrées du Département.

Décide de constituer avec les autres communes du Département un Syndicat de Communes.

Que ce Syndicat aura son siège au Chef-Lieu du Département que sa durée est fixée à 10 années à compter du jour de sa création.
Que le Receveur du Syndicat sera le Receveur de la commune Siège du Syndicat.
Que la commune participera aux dépenses du Syndicat pour la 1ere année, par une contribution égale à la valeur d’un centime communal (cent quatorze) dont le montant sera prélevé sur les fonds libres de la commune ; la participation définitive de la commune aux dépenses syndicales sera fixée par le règlement.

Deux délégués sont nommés pour représenter la Commune au sein du Comité du Syndicat qui portera le nom « Syndicat des Communes Sinistrées du Calvados »

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